Parkinson : la zone du cerveau responsable des douleurs chroniques des malades a été identifiée
Sensations de brûlures, de fourmillements ou de coups de poignards, les douleurs chroniques ressenties par les malades de Parkinson seraient dues à une vitesse de transmission accélérée de l’information de douleur dans une zone de leur cerveau, d’après une nouvelle étude.
Les douleurs et sensations inexpliquées rapportées par les patients atteints de la maladie de Parkinson viendraient en réalité d’un dysfonctionnement du traitement de la douleur dans une région spécifique du cerveau, d’après une nouvelle étude parue dans eLife. Menés par une équipe de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et de l’Université de Grenoble Alpes, ces travaux révèlent l’existence d’un réseau de neurones dont la stimulation pourrait soulager les patients.
« Sensations de brûlure« , « coups de poignard« , démangeaisons ou encore fourmillements sont souvent rapportées par les personnes atteintes de la maladie de Parkinson. Ces ressentis inexpliqués ne sont pas directement liées aux autres symptômes de la maladie. Liée à une carence en neurotransmetteurs, la maladie de Parkinson affecte en effet les systèmes d’autodéfense antidouleur, d’après un dossier de l’association France Parkinson de 2016, qui évalue à 37% le nombre de patients atteints de douleurs chroniques. Ainsi, « chez les malades parkinsoniens, le seuil de perception du signal douloureux baisse, ils sont ainsi plus sensibles : si l’on demande à deux groupes de personnes (l’un atteint par la maladie, l’autre non) de plonger les mains dans de l’eau froide, les patients parkinsoniens ont une sensation de froid douloureux dès 8 °C à 10 °C, alors que les autres le ressentent à 3 °C ou 4 °C« . Pourtant, ces douleurs chroniques disparaissent ou s’atténuent avec les autres symptômes lors d’un traitement par stimulation cérébrale profonde du noyau sous-thalamique, sans qu’on comprenne les mécanismes impliqués. C’est pour éclaircir ce mystère que ces récents travaux ont été menés.
STIMULATION CEREBRALE PROFONDE. La neurostimulation cérébrale profonde est utilisée dans la maladie de Parkinson depuis les années 90. Elle consiste à placer deux électrodes en contact avec des zones précises du cerveau, le plus souvent le noyau sous-thalamique (NST). La synchronisation des neurones du NST est en effet liée à la plupart des symptômes moteurs de la maladie. Reliées à une batterie implantée sous la peau, les électrodes stimulent en continu les zones ciblées et désynchronisent à nouveau les neurones pour qu’ils fonctionnent de manière indépendante. « La stimulation permet d’améliorer en moyenne de 80% le tremblement, 67% la rigidité, 56% l’akinésie (difficulté à initier des mouvements, ndlr), 55% la marche et 73% la durée des blocages journaliers« , expliquait la Revue Médicale Suisse en 2015. Réversible et adaptable, cette procédure a jusqu’à maintenant bénéficié à environ 200.000 personnes représentant 10 à 15% des malades les plus sévères.
Une transmission de la douleur accélérée chez les malades de Parkinson
« Dans cette étude, nous avons cherché à déterminer si le noyau sous-thalamique intervient dans la traduction d’un stimulus nuisible (par exemple une lésion) en douleur, et si cette transmission de l’information est altérée dans la maladie de Parkinson » explique dans un communiqué Arnaud Pautrat, doctorant à l’université Grenoble-Alpes et chercheur principal de l’étude. Pour cela, l’équipe s’est penchée sur des rats. Ils constatent d’abord que les neurones du NST sont activés lorsqu’un animal sain reçoit un bref choc électrique sur la patte. Les rats au NST endommagé mettaient, eux, beaucoup plus de temps que les autres à manifester un inconfort. Mais chez les rats atteints de la maladie de Parkinson, l’inverse s’est produit : les cellules nerveuses du NST présentaient en effet des vitesses de déclenchement plus élevées et des réponses à la douleur plus importantes et plus longues que chez les animaux sains. Selon les chercheurs, la douleur associée à la maladie de Parkinson serait donc due à un dysfonctionnement des voies du traitement de la douleur dans le noyau sous-thalamique.
Une zone du cerveau aux effets antalgiques
Plus précisément, les chercheurs identifient deux zones du cerveau connues pour leur importance dans la transmission de signaux de lésions depuis la moelle épinière : le colliculus supérieur et le noyau parabrachial. En bloquant leur activité, ils observent que ces deux structures jouaient un rôle déterminant dans la transmission des informations de la douleur au NST, et identifient une voie de communication directe entre le NST et le noyau parabrachial. Selon les scientifiques, cette voie directe serait impliquée dans le soulagement de la douleur lors de la stimulation cérébrale. « Il faut maintenant effectuer d’autres expériences pour caractériser précisément les effets, qui ont été observés avec nos modèles expérimentaux, de la stimulation cérébrale profonde sur cette région du cerveau, afin de trouver les moyens d’optimiser cette stimulation en tant que traitement de la douleur induite par la maladie de Parkinson et par d’autres maladies neurologiques »,conclut Véronique Coizet, chercheuse INSERM et directrice de l’étude, dans un communiqué.
Article publié sur www.scienceetavenir.fr